STOP N° 15
LE VERNAY ET PIERRE BONNET


  • LE VERNAY

Ce hameau « Le Vernay », situé à 600 m d’altitude - exposition sud-est, tient son nom de « Verne » d’origine celtique (arbre : vergne, aulne et aune) et « La Varna» en francoprovençal.

En 1358 il prend le nom de territoire de Verneys.

C’est un lieu où poussent les vernes qui prolifèrent dans les zones humides créées par les nombreuses sources des Botières et du Vernay, qui desservaient encore, au 20ème siècle, une partie de Vaugneray. Ces sources sont cohérentes avec l’altitude du canal romain de l’Yzeron (sources : du Rozard, des Serpents, des Rochers, du Pré Marin, du Bois, du Cerisier).

La famille Combe, habitant ce hameau, a caché pendant la deuxième guerre mondiale et durant plusieurs années, Charles, un enfant juif pour le sauver de la police française de Vichy (voir le témoignage de Monsieur Pierre BONNET « sur les pas de l’histoire »).
En période de sécheresse, les agriculteurs de la Girardière venaient y chercher l’eau pour le bétail avec des bœufs qui tractaient une « tonne » (gros tonneau pour le transport de l’eau fabriqué en bois ou en métal).

M. Pierre Bonnet, habitant le Vernay, a fabriqué et installé la croix des sources au début du 21ème siècle.

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  • Pierre BONNET
    (né le 27 décembre 1925 – décédé le 11 avril 2022 à l’âge de 96 ans et demi).
     Une vie hors du commun


    A 6 ans, il était déjà garçon de ferme. Au décès de son père le jour anniversaire de ses 10 ans, Pierre a dû arrêter l’école, et ce, durant toute une année. L’instituteur voyant les capacités du jeune garçon, lui fit rattraper ce retard scolaire, ce qui lui permit d’être reçu au Certificat d’Etudes. Fort de son diplôme, il pensait trouver un emploi, mais…

    “ Je devais trouver un emploi à Lyon, mais il y a eu la déclaration de guerre, il a fallu que je reste pour aider ma mère, ensuite j’ai été placé ouvrier agricole ». 

    A 12 ans, il est placé à la ferme du Vernay, chez la famille Combe ; cette même ferme qu’il a pu acheter en 1953, à l’âge de 22 ans, alors qu’il était encore célibataire.
Il nous raconte :
« Je dormais dans la grange, sur la paille. Pour me laver (à l’eau froide bien sûr !) j’avais un bout de chiffon et un bout de savon. J’étais bien….. Je n’arrêtais pas : je portais chaque jour 200 litres d’eau ; de l’herbe ; du bois…. Lorsque j’avais fini, j’allais aider les voisins… je ne restais jamais sans rien faire ! ».
« Pendant la guerre, j’étais chargé de capter les radios libres à 19 heures 15 : d’abord la radio suisse, ensuite la radio de Londres. Mais avec les grésillements, on entendait mal ».
Il se souvient d’un soir, en 1942, alors que la France était en guerre, de l’histoire du petit Charles, juif, sauvé de la police française de Vichy et dont malheureusement, le père est mort en 1944 dans les camps de concentration en Allemagne. 
« le 5 décembre 1942, on venait de tuer le cochon... Je vois arriver, par un soir de grand brouillard, une vieille femme en pélerine en compagnie d’un petit garçon. Ils avaient dû monter à pied ! C’était Madame Vialatoux : « tu vois ce garçon, me dit-elle, il faut que personne ne sache qu’il est là » et il est resté pendant 2 ans, toujours avec moi.…».
Toujours créatif, lorsqu’il commença bien modestement l’activité d’agriculteur à son compte, il devait livrer le lait à la Maison de Santé (« La Clinique de l’Ouest » aujourd’hui), distante de plusieurs kilomètres de sa ferme, il fabriqua un joug qu’il mettait sur ses épaules (du même type que les jougs que l’on mettait sur les bœufs).
Ensuite, pour transporter davantage de marchandises, il acheta un âne sur lequel il mettait des bombonnes (fabriquées de ses mains), et un bœuf pour labourer les champs. Au début, il cultivait essentiellement des fruits :  pommes et fraises. Ensuite il fit les fruits rouges : cassis, framboises, etc. il livrait également de la paille pour les lits des malades de la clinique psychiatrique jusqu’en 1963.
Son épouse, atteinte de la poliomyélite depuis 1963, a été hospitalisée durant toute une année à Lyon. Pierre menait de front : le travail à la ferme et l’éducation de ses 4 enfants âgés de 8, 6, 4 ans et la dernière-née, de 15 mois, qu’il confia à sa belle-sœur durant quelques mois. Lorsque son épouse handicapée est rentrée à la maison, il s’occupait de tout « Je vivais le jour l’jour, et j’y arrivais ! Je ne me rendais pas compte …. ».
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Pendant cette même année, son troupeau a été atteint de tuberculose. Toutes ses bêtes ont été abattues. Courageux, il a remonté la pente.

Pierre était très généreux, il offrait beaucoup de son temps : il faisait partie du Conseil Municipal de Vaugneray, du Conseil d’Administration du Crédit Agricole. Il accompagnait également les handicapés en pèlerinage à Lourdes jusqu’à ses dernières années.
Aussi, lorsqu’il allait voir ses copains au Cercle Agricole du village, le mardi ou le samedi, il apportait toujours des légumes et des fruits de sa production. Il privilégiait son temps d’après-midi pour son épouse à qui il allait rendre visite chaque jour à l’EHPAD de la Clinique de Vaugneray.
Pierre Bonnet nous a beaucoup aidé lors de la création du circuit patrimoine « A la Découverte de Vaugneray – Sur les pas de l’histoire » pour lequel il a eu la gentillesse de nous faire partager son vécu de près d’un siècle. Il se souvenait de tout ! C’était l’encyclopédie ouverte du village. Le décès de Pierre Bonnet est une grande perte pour nous tous.

« Avec tous nos respects, Monsieur BONNET ».